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La mise en dialogue des toiles d’Angélique de Limburg-Stirum et de Sissy de Pourtalès, malgré la différence de style et d’esthétique, révèle chez elles de nombreux éléments communs, à l’instar de la pratique de la peinture figurative, la création d’œuvres sérielles, ou la passion pour les personnages animaux.

Mais surtout, les deux artistes placent l’action qui se déroule sur leurs tableaux dans la temporalité du crépuscule – le moment où la lune apparaît dans le ciel, les bêtes forestières quittent leurs abris et le travail cède sa place aux loisirs. L’image du loup nocturne, avec toutes ses connotations historiques à commencer par la Lupa Capitolina et Fenrir des Vikings, est accompagnée dans les peintures de Limburg-Stirum de textes exclamatifs : mi-confessions, mi-incantations dans l’esprit des ex-voto paysans. Leur présence permet de considérer ces œuvres comme une sorte de son “autoportrait subconscient”, une projection des forces naturelles débridées de la personnalité de l’artiste, incarnées dans cet animal.

L’importance psychologique et le caractère véritablement cathartique de cette mise en scène deviennent d’autant plus évidents qu’une rencontre soudaine avec un loup au milieu de la forêt n’est pas le fruit d’un fantasme de Limburg-Stirum, mais une véritable et plutôt terrifiante épisode de sa vie.

Les sentiments exacerbés et l’intense intimité à laquelle on s’adonne après le coucher du soleil sont au centre de la pratique artistique de Pourtalès.

L’une de ses heroines se déshabille devant une fenêtre ouverte sur la mer nocturne, une autre fume une cigarette sous des néons violets comme ceux des boîtes de nuit. Le troisième, vêtue juste d’un slip et d’un vieux t-shirt, tout barbouillé de peinture, dessine quelque chose dans l’ombre.

Le puissance magique du crépuscule atteint son apogée dans les tableaux Autoportrait, volcan et aureole et Blue Demon. Sur le premier, Angélique de Limburg-Stirum a dessiné une jeune dame sous le ciel sombre avec le volcan prêt à exploser (une image vachement freudienne!) derrière son dos.

Depuis le second, par Sissy de Pourtalès, nous regarde une petite diable (comme en témoigne sa poitrine), dansant à la lueur d’une étoile. Les deux toiles représentent leurs personnages au bord, ou juste après, d’une certaine métamorphose. Celle qui se produit, comme le disent les légendes médiévales, lorsque le crépuscule tombe sur la terre.

Commissaire de l’exposition: Nikita Dmitriev

Galerie Charraudeau
October 22 – November 5, 2022
3 rue Bonaparte, 75006 Paris



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